Pour comprendre cet effacement partiel des vins du Sud-Ouest, il faut d’abord revenir à l’histoire des privilèges accordés aux commerçants bordelais dès le Moyen Âge. À l’époque, Bordeaux n’était pas qu’une région viticole : c’était surtout un port stratégique, accessible depuis l’Angleterre et les marchés internationaux. En 1241, le roi d’Angleterre Henri III accorde la Charte des vins de Bordeaux, un ensemble de privilèges commerciaux visant à favoriser le commerce des vins girondins.
Parmi ces privilèges, l’un des plus marquants imposait des restrictions strictes aux vins du Haut-Pays, terme désignant les régions situées en amont de Bordeaux, notamment les terroirs du Sud-Ouest. Les vignerons de Gaillac ou de Bergerac, par exemple, ne pouvaient commercialiser leurs vins dans la ville portuaire avant la fin des ventes des vins bordelais. Ce droit de "prémices" ou privilège bordelais garantissait aux négociants de Bordeaux une maîtrise presque absolue des marchés, reléguant les vins des autres régions à un rôle secondaire.